La Suède, seul pays au monde à s’être libéré de la cigarette : comment ont-ils fait ?

Pour Federico N. FERNANDEZ, CEO du réseau d’ONG We Are Innovation, la façon dont la Suède s’est définitivement débarrassée de la cigarette illustre parfaitement son credo. Pour lui, l’innovation et l’entrepreneuriat peuvent résoudre la plupart des grands problèmes sociétaux que nous connaissons aujourd’hui. Écoutons-le revenir sur le documentaire en forme d’enquête qu’il a produit en 2023 : Comment la Suède a-t-elle arrêté de fumer ?

Actuellement CEO du réseau d’ONG We Are Innovation, Federico N. FERNANDEZ est également président de la Fundación Internacional Bases, dont le siège se situe en Argentine. Et un parfum de libertarianisme flotte autour de ce think tank soutenant les idées de Javier Milei, actuel président argentin : toujours moins d’État, toujours plus de marché ! Pour les libertariens, il est urgent de complètement laisser faire (le marché).

Comme l’expose Federico N. Fernández, « depuis 2004, notre fondation met en lumière les innovations apportant des solutions aux problèmes sociétaux dans le monde. Nous croyons que la plupart des problèmes peuvent être résolus par l’entrepreneuriat, l’initiative privée et les individus testant leurs idées sur le marché. Nous travaillons par conséquent à créer un environnement favorable à l’esprit d’entreprise ». Pour autant, We Are Innovation s’affirme comme étant apolitique, n’émargeant auprès d’aucun parti politique. « Nous considérons que l’innovation n’est ni de droite, ni de gauche, mais qu’elle transcende les idéologies ».

Comment définir l’innovation ?

Selon Matt Ridley, auteur vedette chez les libertariens (mais honni par une certaine gauche), l’innovation est souvent, premièrement, le résultat de la réorganisation de choses préexistantes. Deuxièmement, l’innovateur est celui qui parvient à faire baisser les coûts. « Cela nous intéresse vraiment, en raison du potentiel inclusif que cela recouvre. Autrement dit, la spéculation scientifique per se n’est pas d’un grand intérêt pour nous. Elle nous intéresse lorsque, combinée à certains outils technologiques, elle conduit à des changements sociétaux importants ».

Par exemple, en matière de FinTech ou de technologie financière, We Are Innovation s’intéresse à la numérisation des services bancaires. En effet, en Amérique latine, 40 % des adultes n’ont pas de compte bancaire, ce qui fait qu’ils se retrouvent en marge de la société. « Aujourd’hui, grâce au téléphone portable ainsi qu’à d’autres technologies, il est beaucoup plus facile d’avoir un portefeuille numérique, une banque numérique, etc. Nous considérons qu’il s’agit là d’une avancée positive en faveur d’une plus grande inclusivité ».

De la même façon, Federico N. FERNANDEZ salue la numérisation des services gouvernementaux (e-gouvernement) agressivement menée par l’Estonie. « Nous admirons vraiment la façon dont ils ont réduit la bureaucratie grâce à l’e-gouvernement. Si bien que le citoyen estonien se retrouve à présent réellement au centre des préoccupations des administrations de son pays ».

Suède : seul pays « non-smoking » au monde

Quant à la Suède, c’est une innovation d’un autre type qui lui a permis d’arrêter de fumer. Ainsi, moins de 5 % de la population suédoise fume encore. Du même coup, ce pays a résolu toutes les problématiques de santé publique liées à la consommation de cigarettes (cancers des poumons, etc.).

Mais comment ont-ils fait ? Selon Federico N. FERNANDEZ, l’innovation a permis de venir à bout de l’usage de la cigarette. Même si la nature de l’innovation est ici tellement modeste et discrète qu’elle pourrait tout à fait passer inaperçue.

Comme notre interlocuteur le rappelle, le snus est une pâte onctueuse fabriquée à partir de tabac que l’on place entre la lèvre supérieure et la gencive. Cela permet de diffuser de la nicotine dans l’organisme. « C’est un produit très particulier. Son odeur forte ne le rend pas particulièrement attrayant ».

Du snus aux produits nicotiniques

Durant la deuxième moitié du 20^e siècle, l’usage du snus décline parmi les Suédois, car il subit la concurrence de la cigarette, considérée comme plus « branchée », moderne et élégante. Cependant, il reste particulièrement populaire parmi les cols bleus. Pour ces derniers, le snus a l’avantage de leur permettre de continuer à utiliser leurs mains pour travailler, contrairement à la cigarette qui oblige à faire une pause.

Dans les années 60 et 70, la nocivité de la cigarette devient évidente. En revanche, les Suédois remarquent que les consommateurs de snus ne souffrent pas des problèmes affectant généralement les fumeurs (maladies du système respiratoire). D’autant que grâce à l’innovation, le snus devient moins « ringard » et plus facile à consommer. Au lieu de se présenter sous la forme d’une pâte onctueuse, il commence à être vendu en petits sachets pré-dosés. Par la suite, dans les années 2000, diverses alternatives nicotinées émergent : tabac à chauffer, sachets de nicotine sans tabac, notamment.

Cela est particulièrement intéressant pour les femmes qui, aujourd’hui encore, ont tendance à fumer davantage que les hommes en Suède. En effet, elles n’ont jamais accepté le snus comme alternative socialement acceptable en comparaison de la cigarette. Elles ont donc recours aux substituts nicotiniques. « Ainsi, bien que tout ait commencé avec le snus, ce dernier ne représente qu’une partie de l’histoire racontée dans notre documentaire ».

Et la dépendance, dans tout ça ?

Arrêter de fumer peut se révéler difficile pour certaines personnes, véritablement accros à la cigarette et la nicotine. À ces personnes, Federico N. FERNANDEZ fait remarquer que le snus et autres substituts nicotiniques leur permet de consommer de la nicotine. Tout en évitant les problèmes liés à la combustion des matières toxiques contenues dans les cigarettes (goudrons, notamment). Dès lors, pourquoi ne pas envisager de switcher ?

Cependant, notre interlocuteur nous prévient qu’il convient de réserver ce type de produits aux adultes seulement. « Ces produits ont donc besoin d’une réglementation intelligente, minimale et appropriée ». Par conséquent, We Are Innovation interroge dans son documentaire l’interdiction totale du snus dans tous les pays de l’Union européenne, Suède exceptée, compte tenu des avantages qu’il revêt…

Comment la Suède a-t-elle arrêté de fumer ? : 1,5 million de vues

Dans cette vidéo, Comment la Suède a-t-elle arrêté de fumer ?, Federico N. FERNANDEZ présente les témoignages de médecins, d’innovateurs et de militants anti-cigarette. « Nous avons essayé d’identifier les personnes les mieux placées. Toutes les interviews ont été tournées en Suède et ce sont des Suédois ayant consacré leur vie à ce sujet qui nous racontent leurs histoires ».

Le cas de Jean-Pierre Barda, ancien membre du groupe disco-pop des années 1990 « Army of Lovers » est particulièrement éclairant. Le réalisateur du film, Tomasz Agencki, le découvre alors que toute l’équipe est déjà en Suède, sur le point de commencer à tourner. Federico N. FERNANDEZ reconnaît que le témoignage de l’ancien chanteur est l’un des plus marquants du documentaire. « Il illustre le cas d’un fumeur impénitent se tournant finalement vers les produits nicotiniques ».

Comme le souligne Federico, Comment la Suède a-t-elle arrêté de fumer ? disponible sur X et YouTube, cumule désormais 1,5 million de vues  ! « Ce score montre l’intérêt représenté par le sujet. Ce succès est dû au talent du réalisateur Tomasz Agencki, ainsi qu’aux témoignages que nous avons recueillis. Ces derniers embarquent notre audience ! »

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Le cas de la France bientôt passé au crible par We Are Innovation

Parmi ses autres sujets de prédilection, Federico N. FERNANDEZ milite pour l’adoption d’un système d’imposition forfaitaire (flat tax en anglais). « Nous pensons que ce système est le meilleur et le plus juste de tous les systèmes fiscaux. Il est également très favorable à la croissance et à l’innovation ». En outre, Federico N. FERNANDEZ promeut le libre-échange à travers le traité récemment signé par l’Union européenne et le Mercosur.

Enfin, last but not least, We Are Innovation s’intéresse à l’énergie nucléaire (voir leur rapport sorti en février dernier à ce propos). « L’énergie nucléaire permet de produire une énergie propre et abondante. Elle pourrait même permettre à l’Europe d’atteindre son indépendance énergétique et de retrouver une croissance forte ! Nous nous penchons longuement sur le cas de la France dans notre rapport. En effet, nous avons à cœur de montrer comment la France pourrait servir d’exemple au reste du monde en matière de politique nucléaire ! »