Avec 60.000 étudiants répartis sur l’ensemble de la métropole de Bordeaux, la capitale du Sud-Ouest apparaît comme un paradis étudiant : choix des formations, richesse de la vie culturelle, opportunités d’emplois, etc. Pour autant, les problèmes existent aussi, entre coût de la vie, accès au logement et aux transports. L’association Campus Chartrons, regroupant les établissements privés d’enseignement supérieur du centre-ville, a souhaité, sous l’égide de son président Guillaume Petit, connaître précisément leurs conditions de vie.
Aujourd’hui directeur de l’ISCOM (Institut Supérieur de Communication et de Publicité), Guillaume Petit est originaire de Nouvelle-Aquitaine. « Du Lot-et-Garonne, précisément », insiste-t-il. « J’ai fait des études de droit à Bordeaux, avant de me lancer dans la communication. J’ai toujours été passionné par la communication et aussi la formation ». Après avoir travaillé un temps dans une agence à Paris, il intègre en 1993 le premier groupe coopératif céréalier d’Europe, à Reims. Il y officie pendant quinze ans en tant que directeur de la communication.
Guillaume Petit, à la fois directeur de l’ISCOM Bordeaux…
Cependant, pris de nostalgie pour le Sud-Ouest, il revient à Bordeaux dans le secteur de l’enseignement supérieur privé pour mettre en place de nouvelles écoles. En 2019, il crée l’ISCOM Bordeaux, partie intégrante du groupe Eduservices, groupe familial spécialisé dans l’enseignement supérieur privé.
Le groupe Eduservices regroupe 42.000 étudiants en France, dont 20.000 en alternance. Quant à l’ISCOM, cet institut se déploie sur dix campus, dont deux ouverts à la rentrée 2022 (Rennes et Nice). Il s’adresse aux étudiants intéressés par la communication et la création. Et propose notamment de les mener à bac+5 via son Programme Grande École. À Bordeaux, l’ISCOM compte 150 étudiants pour 60 intervenants. Parmi ces derniers, tous sont des professionnels de la communication et de la création néo-aquitains.
… et président de l’association Campus Chartrons
Dans son ensemble, Bordeaux Métropole compte plus de 60.000 étudiants. Les facultés publiques historiques se situent à Talence ou Pessac. Cependant, depuis quinze ans, le quartier des Chartrons est investi par des établissements d’enseignement supérieur, alors qu’il était autrefois dédié aux chais de vinification. Aujourd’hui complètement réhabilité, il compte 33 établissements d’enseignement supérieur privé, ce qui représente 10.000 étudiants.
Ces écoles assurent des parcours en formation initiale et en alternance. « Certes, elles se font concurrence entre elles pour attirer les étudiants. Cependant, toutes veulent améliorer les conditions de vie de ces derniers. Elles se sont donc regroupées au sein d’une association : Campus Chartrons ». Et ont cherché à mieux connaître leurs étudiants, en recueillant leur ressenti directement.
En septembre 2022, Campus Chartrons a donc lancé une grande enquête auprès de l’ensemble des étudiants de ses écoles adhérentes. « Nous avons été surpris par le nombre de réponses reçues : 1.500 ! Cela constitue un panel important, car il est difficile de faire réagir les étudiants sur des sujets qui, pourtant, les touchent de près. Nous avons pu prendre une photographie assez précise de leurs conditions de vie. Quels sont les endroits où ils sortent ; comment se logent-ils, etc. ? » Fort des résultats de son enquête, Guillaume a par la suite rencontré les pouvoirs publics, dans le but d’apporter des solutions aux problèmes mis à jour.
Principaux enseignements de l’étude de Campus Chartrons : transport et aides…
Avec son équipe, Guillaume s’est penché sur divers items. Quelle n’a pas été sa surprise de constater que la voiture restait le mode de transport privilégié des étudiants. « 25% d’entre eux se rendent sur le campus des Chartrons en voiture. Alors qu’il est situé en plein centre-ville, et que l’offre de transports publics est pléthorique, entre la TBM, les TER, etc. »
Quant aux dispositifs d’aides, il apparaît que les étudiants ignorent largement les soutiens auxquels ils pourraient pourtant prétendre. Cela a surpris les responsables régionaux, compte tenu de leurs efforts pour communiquer sur le sujet. En effet, la région Nouvelle-Aquitaine encourage ses étudiants à réaliser une partie de leur parcours estudiantin en dehors de l’Europe. Si Erasmus couvre les pays de l’UE, il existe pour le reste du monde des dispositifs spécifiques. « Certes, tous les étudiants ne peuvent y prétendre, car ils sont conditionnés aux revenus de leurs parents. Cependant, ils sont bien là ! », souligne Guillaume.
… mais aussi le logement…
Un autre item de l’enquête concerne le logement. « Là, nous avons perçu la différence entre l’avant et l’après-Covid. Auparavant, quand un étudiant cherchait un logement sur Bordeaux ou sur la métropole, son critère de choix principal était la localisation. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. L’étudiant demande surtout que le logement bénéficie d’une connexion internet en parfait état de fonctionnement ».
En effet, pendant le confinement, les étudiants se sont retrouvés dans l’obligation de rester chez eux et de suivre leurs cours en ligne. De plus, aujourd’hui, dans le cadre de leur stage ou de leur formation en alternance, une bonne partie de leur travail se fait désormais à distance. Le besoin d’une connexion fiable est donc devenu absolument vital. Car le logement ne représente plus seulement un espace de vie, mais aussi un espace de travail.
… ou encore les sorties
Une autre difficulté provient de l’augmentation du prix des loyers. « Les logements existent et sont bel et bien disponibles, mais à quels prix ! Pour ma part, je refuse de diffuser auprès de mes étudiants certaines annonces pour des studios proposés à 900 € ! Car ce genre de loyers est tout à fait déraisonnable, ne serait-ce que par rapport aux critères du marché ».
En outre, l’enquête s’est penchée sur les sorties des étudiants. « Là, nous avons constaté qu’ils fréquentaient assidument les spectacles, concerts et autres expos, profitant ainsi pleinement de l’offre culturelle riche et diversifiée de Bordeaux ». En revanche, 30% des étudiants ont mis le doigt sur les problèmes liés à la sécurité. En effet, certains n’osent pas sortir tard le soir, tous sexes confondus.
Grâce à Campus Chartrons, une prise de conscience par les pouvoirs publics
Lorsque les résultats de l’enquête ont été rendus publics en avril dernier, la région, compétente en matière d’enseignement supérieur, a immédiatement contacté Campus Chartrons. « Ses représentants nous ont reçus pour une réunion de plus de trois heures. Nous avons donc passé en revue l’ensemble des items et des réponses recueillies ».
La région a ainsi cherché à savoir si la fréquence des TER correspondait au rythme de vie étudiant. Par ailleurs, la Nouvelle-Aquitaine a décidé de refondre complètement sa communication sur les dispositifs d’aides aux étudiants.
Concernant la restauration plus spécifiquement, Campus Chartrons est en contact suivi avec les responsables du Centre régional des œuvres universitaires et scolaires (Crous) de Bordeaux. « Nous examinons la possibilité d’allonger les plages horaires des restaurants universitaires. En effet, le restaurant universitaire des Chartrons ouvre pour l’instant de 11h30 à 13h45. Ne peut-on pas envisager un espace de coworking dans lequel les étudiants viendraient se rencontrer et travailler collaborativement, même en dehors des heures de repas ? »
Forts de ces enseignements, Campus Chartrons et les pouvoirs publics préparent pour la rentrée universitaire 2023 une synthèse complète en ligne. Elle reviendra largement sur les dispositifs proposés par la région (y compris le Crous), la métropole et la ville de Bordeaux.
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Évolutions du mode de vie des étudiants
Du point de vue de l’évolution du mode de vie étudiant, l’étude de Campus Chartrons a montré que ces derniers, désormais, travaillaient massivement. 20% ont ainsi un job du soir : restauration, soutien scolaire, etc. Nombre d’entre eux prennent aussi part à l’organisation de soirées culturelles à Bordeaux (accueil, contrôle des billets, etc.). Ne serait-ce que pendant 10 à 15 heures par semaine… Ces revenus d’appoint sont les bienvenus, car leur budget n’est pas extensible.
Plus généralement, les étudiants bénéficient désormais de facilités pour se déplacer à l’étranger à moindre coût. « À mon époque, cela coûtait une fortune de voyager dans un pays étranger, ne serait-ce qu’en Europe, pour y faire un stage, par exemple ». Aujourd’hui, Erasmus de même que les programmes d’échanges des écoles les encouragent à voyager dans le cadre de leurs études. Comme le note Guillaume, « il est fabuleux pour un jeune de pouvoir découvrir d’autres cultures. C’est important pour son enrichissement intellectuel ainsi que pour son ouverture d’esprit ».
En revanche, la multiplicité des réseaux sociaux et l’évolution des conditions d’accès à l’information font que les étudiants ont parfois une approche trop superficielle. « Ils considèrent qu’en ayant lu une alerte de quelques lignes ou en ayant visionné un tutoriel de quelques minutes, ils maîtrisent totalement un sujet. Ils en sont absolument convaincus ! Il convient donc de booster leur niveau de culture générale ».
Guillaume Petit (directeur de l’ISCOM, président de l’association Campus Chartrons) souligne l’importance des conditions de logement des étudiants. Aujourd’hui, une connexion internet fiable n’est plus en option, comme certains propriétaires semblent le penser ! Photo : (c) Campus Chartrons. Vidéo : (c) LaTDI.
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