Avez-vous déjà entendu parler de la Psychologie positive ? Dans leur livre au titre éponyme sorti dans la collection My Happy Job (éditions Vuibert) le 11 octobre dernier, Justine Chabanne et Ilona Boniwell nous invitent à l’introspection. Sans nous focaliser nécessairement sur les moments de souffrance par lesquels nous passons tous. Mais en recherchant plutôt ceux où notre motivation et notre satisfaction au travail sont au plus haut ! Nous avons rencontré Justine afin qu’elle nous présente leur ouvrage…
Ilona Boniwell et Justine Chabanne sont toutes les deux associées au sein d’un cabinet de conseil en psychologie positive, Positran. Ilona est l’une des tenantes mondiales de la psychologie positive. Russe, lettone, anglaise et française, elle a, vingt ans auparavant, été mentorée par le père fondateur de la psychologie positive, Martin Seligman. Elle est aujourd’hui professeur à l’East London University, où elle a créé le premier master de psychologie positive en Europe. Par la suite, elle est venue en France où elle a monté Positran. C’est au sein de cette structure que les deux femmes se rencontrent.
Justine, elle, est psychologue du travail et des organisations. Elle s’intéresse très tôt à la psychologie positive. « C’est une discipline que j’ai adorée dès le moment où je l’ai découverte, alors que je n’étais encore qu’une étudiante ». Elle commence sa carrière professionnelle au sein d’une banque, dans les domaines de la transformation et de l’innovation. Par la suite, elle rejoint Ilona au sein de Positran. Elle y conduit formations et coachings, ainsi que des accompagnements individuels centrés autour de la psychologie positive du travail.
Ilona Boniwell et Justine Chabanne : conseils en psychologie positive auprès des entreprises
Selon Justine, « la psychologie positive au travail utilise la thématique du bien-être au travail, en la combinant avec celles de l’engagement et de la motivation. Pour moi, ces deux aspects sont très imbriqués. Nous recevons de nombreuses demandes tournant autour de ‘l’accompagnement managérial augmenté’ ».
En d’autres termes, les deux femmes attirent l’attention de leurs clients sur certaines nouvelles pratiques managériales. Elles analysent le positionnement des managers, leurs besoins, dans le cadre d’une démarche interactive. « Par exemple, nous avons accompagné les GO dans la refonte des mini-clubs au sein du Club Med. Nous les avons formés à la psychologie positive pour leur donner des outils appliqués. Nous avons également veillé à ce que les GO puissent partager ce regard avec les enfants, pour faire grandir ces derniers au sein de leur expérience du mini-club ». Ilona et Justine construisent alors tout un parcours de formation et d’accompagnement des GO avant de le mettre en œuvre au sein de différents Clubs Med à travers le monde.
En outre, elles proposent une ‘boîte à outils de l’engagement et du bien-être au travail’ à certaines mutuelles. Les missions variées qu’on leur confie tournent autour de la satisfaction et de la motivation au travail. « Nous intervenons en tant que formatrices / consultantes, en fonction de la prestation attendue : prestation clé en main ou sur-mesure ».
La psychologie positive, c’est quoi ?
La psychologie positive représente le versant complémentaire de la psychologie traditionnelle. Cette dernière a tendance à se focaliser sur les moments que tout un chacun traverse dans sa vie : la souffrance, etc. La psychologie positive, quant à elle, étudie notre mode de fonctionnement lorsque tout va bien. Dans le contexte du travail, elle se focalise sur les moments où nous sommes motivés et accomplissons un excellent travail. Elle cherche à identifier les leviers nous aidant à trouver satisfaction et engagement. Elle permet ainsi de renforcer nos ressources. Parmi ces dernières : nos forces !
À la recherche du ‘flow’
Nos forces relèvent de la catégorie de leviers que nous activons lorsque nous sommes authentiques, bons et énergisés. Selon Justine, « nous nous disons alors : je suis bien à ma place, je suis aligné, je me sens stimulé. Mon activité et la perception que j’en ai, cela me booste ! Quand nous prenons conscience de vivre de tels moments, nous perdons toute notion du temps. C’est ce qui se produit lorsque nous sommes totalement impliqués dans une tâche ».
C’est ainsi que Justine résume, de façon très simplifiée, la théorie du flow, centrée autour de « l’expérience de la motivation optimale ». « Ce sont de bons moments, de bonnes ressources. En fait, si nous prenons le temps de les analyser, cela donne des pistes pour améliorer son bien-être. Cela peut même nous aider à rester performants sur la durée ».
Le flow concerne donc des situations particulières, ponctuelles. « Si vous êtes toute la journée en état de flow, déconnecté du temps qui passe, cela finit par être un peu bizarre et inauthentique. Cependant, si vous vivez des moments fugaces de satisfaction et de motivation dans la journée, au cours desquels vous vous sentez alignés avec ce que vous faites, vous avez trouvé votre flow ».
Les fondements scientifiques de la psychologie positive…
En entreprise, la psychologie positive peut aussi bien s’intéresser à un collaborateur, qu’à une équipe, voire à une organisation dans son ensemble. Ainsi, il est intéressant de se demander ce que cette dernière peut offrir, en termes de cadre, de ressources organisationnelles, aux personnes pour qu’elles soient satisfaites et engagées.
En cela, la psychologie positive va au-delà du simple développement personnel. Car elle aborde les aspects liés aux groupes, institutions, organismes, entreprises, voir même aux sociétés dans leur ensemble.
En outre, la psychologie positive est fondée sur la recherche scientifique. C’est la raison pour laquelle l’ouvrage d’Ilona et Justine inclut une bibliographie à la fois riche et ciblée. À charge pour le lecteur d’aller plus loin s’il le souhaite. Les autrices reprennent ainsi un certain nombre d’idées développées par des universitaires.
… n’empêchent pas une certaine gamification
Pour autant, les autrices ont voulu insérer dans leur ouvrage de multiples ateliers et exercices sous forme de jeux. « C’est la raison pour laquelle la collection nous a tout de suite beaucoup plu. Ilona et moi adorons le jeu, et nous avons souvent recours à la ‘gamification’ ».
Ces jeux demeurent ‘sérieux’ (serious games, en anglais), toutefois. Ils permettent de conserver certaines dynamiques à travers les instructions de jeu. « Par exemple, dans le jeu de cartes des forces, nous invitons les personnes à trouver leurs forces. Nous nous appuyons sur des activités en apparence légères pour faciliter la démarche d’apprentissage. Le fait d’avoir une représentation de ces forces, de pouvoir toucher les cartes, élimine la barrière du vocabulaire pour aborder certaines notions complexes ».
Selon Justine, « le fait de manipuler des éléments concrets facilite la compréhension de la question posée. Par exemple, je n’ai jamais animé un jeu de cartes des forces au cours duquel personne n’a trouvé ses forces. Le jeu nous aide à démystifier des thèmes sérieux, tout en facilitant échanges et découvertes ».
Quand la psychologie positive heurte parfois… avant de réénergiser (Justine Chabanne). Photo : (c) Positran. Vidéo : (c) LaTDI.
Triangle des sens : trouver l’alignement parfait
Lorsque nous demandons à Justine de nous indiquer le chapitre le plus important du livre à ses yeux, elle répond sans hésiter : « le dernier. La crise sanitaire a exacerbé la recherche de sens au travail : pourquoi travaille-t-on ? Que représente le travail dans notre vie ? Pourquoi travaillons-nous dans telle organisation plutôt que telle autre ? Les enjeux autour de cette thématique du sens sont d’une actualité brûlante ».
Par conséquent, le triangle des sens est constitué de trois angles : 1/ Sens de la vie ; 2/ sens du travail ; 3/ mission de l’entreprise. Chacun représente un type de sens dont nous avons besoin. Toute entreprise a une mission, qui est son but, ce à quoi elle sert, ou encore sa raison d’être. « Si nous adhérons pleinement à la mission de notre entreprise, nous sommes poussés à nous engager à fond dans notre travail ».
À lire également : My Happy Job (éditions Vuibert), ou comment atteindre le bien-être au travail.
Vient ensuite le sens que nous donnons à notre travail : au quotidien, « à quoi sert-il ? Quelle importance revêt-il à mes propres yeux ? » Enfin, nous sommes tous amenés à nous poser la question du sens de la vie : que représente le travail dans ma vie ? « Si mon travail occupe une place importante, intéressante, primordiale au sein de mes activités, cela vient nourrir ma motivation et ma satisfaction au travail. À l’opposé, si dans ma vie j’ai d’autres passions (voyages, famille, etc.), l’importance relative de mon travail diminuera, il sera moins important et je serai par conséquent moins engagé(e) ».
Si nous constatons une concordance entre les trois angles du triangle des sens, il est évident que notre motivation et notre satisfaction en ressortent décuplées. À méditer…
(c) éditions Vuibert, 2022
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